La magie

La magie : mystère et émerveillement

Le grimoire, livre de magie • Photo 44309859 © Vera Petruk | Dreamstime.com

Sommaire de cette édition

Malakoff Humanis et vous

La magie : mystère et émerveillement

La magie nourrit l'imagination des hommes depuis des millénaires. Certains adeptes l’envisagent comme une passerelle entre le monde visible et les mystères de l'invisible. D’autres la considèrent comme un art à part entière, celui de l’illusion qui défie la logique et bouleverse les certitudes. Dans les rituels antiques, la magie était utilisée pour influencer les forces de la nature. Aujourd’hui, elle se veut plus légère et nourrit les tours de passe-passe qui enchantent le public des théâtres modernes. En bref, la magie est l’art de l’impossible. C’est une fenêtre ouverte sur l’émerveillement, le sublime et la surprise. Les grands dictionnaires la décrivent comme « un ensemble d'arts et de pratiques qui cherchent à manipuler les aspects cachés de la réalité ou à influencer le cours des événements par des moyens apparemment surnaturels ou exploitant des forces occultes ». La plupart distinguent deux grandes familles de magie. D’une part, la magie rituelle, souvent connectée à des pratiques ésotériques et spirituelles. D’autre part, la magie de spectacle, connue sous le nom de prestidigitation ou d’illusionnisme, qui est l'art de créer des illusions pour divertir le public. Cette seconde forme de magie repose sur l'habileté manuelle du praticien, sur des techniques de manipulation psychologique du spectateur, sur l’emploi scénarisé de gadgets et parfois sur des technologies plus sophistiquées. Le magicien mène des expériences qui défient notre perception de la réalité : tours de cartes, disparitions, lévitations, magnétisme simulé et autres illusions.

Les cartes, accessoire primordial du prestidigitateur • Photo 40621961 | Magic © Fernando Gregory | Dreamstime.com

La magie peut aussi être considérée comme une quête de connaissance et de pouvoir sur les éléments inexplorés ou inexplorables de l'univers. Qu'elle soit utilisée pour l'émerveillement, le divertissement ou à des fins ésotériques, elle fascine, effraie ou divertit, selon les époques, les cultes dominants, les courants de pensée et les modes.

L’odyssée de la magie à travers les âges

L’histoire de la magie remonte aux premières civilisations humaines, lorsque les chamans et les vieux sages étaient considérés comme des intermédiaires entre les hommes et les divinités. D’abord mêlée d'ésotérisme, explorant des croyances et des pratiques occultes pour tenter de percer les secrets de l’univers, la magie se transforma, siècle après siècle, se teintant de mysticisme, d’obscurantisme ou de religion, avant de devenir un art populaire et respecté.

Dans les civilisations antiques d’Égypte et de Mésopotamie, les magiciens étaient des figures vénérées, possédant la sagesse des dieux et le pouvoir de communiquer avec l'au-delà. Certains pratiquaient des rituels complexes pour tenter de guérir ou de soulager un malade, pour apaiser la colère d’un dieu ou pour invoquer son intervention gracieuse. Les talents de ces magiciens étaient considérés comme des dons surnaturels. Une anecdote célèbre raconte comment le pharaon Khéops fut impressionné par un magicien nommé Djedi qui aurait été capable de décapiter un oiseau avant de le ramener à la vie et de lui rendre sa tête. Cette histoire ancienne reflète notre fascination constante pour des actes qui défient la compréhension et malmènent les croyances établies.

À l’époque gréco-romaine, la magie prit une teinte plus sombre, associée à la pratique de la sorcellerie et entachée de malédiction. Mais elle fut aussi source de divertissement avec l’émergence de magiciens ambulants qui réalisaient des tours pour émerveiller les passants dans les rues de Rome. Au Moyen Âge, la magie fut violemment réprimée et condamnée par l’Église chrétienne qui la considéra comme intimement liée à la sorcellerie, voire à l'hérésie. C’est pourtant à cette époque que furent écrits les premiers livres contenant des tours de magie faciles à réaliser par un novice. Ces ouvrages, interdits et dangereux pour l’esprit selon l’Église, commencèrent à circuler secrètement, jetant les bases de la prestidigitation moderne.

Apparitions, disparitions, illusions • Photo 40621914 | Magic © Fernando Gregory | Dreamstime.com

La magie de spectacle que nous connaissons aujourd’hui, appelée illusionnisme ou prestidigitation, trouve ses racines dans les foires médiévales. Des troubadours et des saltimbanques avaient recours à la magie pour pimenter leurs spectacles. Habiles et très entraînés, ces artistes itinérants jonglaient avec des objets et réalisaient des tours de cartes magiques qui suscitaient la fascination du public. À l’époque victorienne, ce genre de magie devint une forme aboutie de divertissement. Les illusionnistes de cette physique amusante faisaient apparaître des lapins ou des colombes d’un chapeau ou d’une cape, donnaient l’illusion de se jouer de la gravité, prédisaient l’avenir et lisaient dans les pensées.

L'âge d'or de la magie débuta au XIXe siècle, lorsque la science et l'innovation ouvrirent de nouvelles portes à l'illusionnisme. Jean-Eugène Robert-Houdin, considéré comme le père de la magie moderne, transforma la pratique des tours plus ou moins grossiers réalisés dans des foires en un art respecté et célébré. En 1845, il inaugura à Paris le premier théâtre de magie, ébranlant de manière durable l’image traditionnelle du magicien qu’il contribua à faire passer du statut de vagabond à celui d’artiste distingué. Le tournant du XXe siècle vit l'émergence de magiciens prestigieux dont les noms sont passés à la postérité, à l’instar de Harry Houdini, le roi de l'évasion, qui défia la mort à chaque spectacle, s'échappant de menottes, de chaînes, et même de coffres immergés. Dans les récits de ses évasions, la valeur de la vie et l'art de l’illusion se mêlent étroitement pour sublimer le mystère.

Harry Houdini, le maître de l’évasion • Dreamstime.com

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Dans la seconde moitié du XXe siècle, l’art de l’illusionnisme continua d'évoluer, embrassant la technologie et repoussant les limites de la perception. Les spectacles vivants de magie devinrent de vastes productions, mettant en scène des stars comme David Copperfield, qui furent capables de faire disparaître des monuments et de léviter à travers le Grand Canyon. La magie moderne se situe à la croisée des chemins entre art ancestral et promesses techniques. Avec le développement des effets spéciaux au cinéma et celui de l’intelligence artificielle capable de produire de la musique et des images d’un réalisme criant, nos sens sont mis à rude épreuve et peinent à démêler le vrai du faux. Les outils et autres gadgets que nous utilisons quotidiennement auraient assurément semblé magiques à nos ancêtres. Qu’aurait par exemple pensé Isaac Newton en observant une scène de notre vie quotidienne dans laquelle un objet rectangulaire fait de verre et de métal, doté d’une face sur laquelle des visages apparaissent, permet à celui qui le détient de dialoguer à distance avec une autre personne ? Cette magie moderne, fruit de la science et de l'innovation, révèle que la magie en tant que fenêtre sur le merveilleux, est fortement empreinte de culture et de croyances. Elle reflète notre quête perpétuelle pour comprendre l'incompréhensible et contrôler l'incontrôlable.

Photo 148123601 | Magic © Vera Petruk | Dreamstime.com

Chaque époque a façonné la magie à son image, en s’inspirant des craintes, enjeux et espoirs de nos sociétés. Mais en dépit de ses nombreuses évolutions, la magie demeure le domaine de l'extraordinaire par excellence et s’enracine dans un espace où l'impossible devient possible, pour notre plus grand plaisir. Les grands illusionnistes défient la réalité en repoussant les limites de ce que la logique parvient à expliquer. De nombreux observateurs estiment d’ailleurs que les magiciens de légende sont réellement dotés de pouvoirs surnaturels. Avec eux, le monde du possible tutoie celui de l’étrange.

Un art aux mille visages : de l’illusionnisme à l’ésotérisme

La magie se manifeste à travers une multitude de formes qui ont évolué et se sont métamorphosées au fil des siècles. Les illusionnistes d’aujourd’hui nous font croire à l'impossible. Avec leurs tours de cartes, disparitions et lévitations, ils sont les héritiers modernes de plusieurs générations de prestidigitateurs, perpétuant une tradition séculaire de divertissement à laquelle ils ajoutent une touche de sophistication technique et de psychologie qui confondent les esprits les plus critiques.

Une autre forme de magie existe, souvent mêlée de superstitions et de rituels. Elle fut transmise de génération en génération à travers les contes et les légendes. Potions aux charmes protecteurs, sortilèges enchanteurs, rituels salutaires… autant de pratiques enracinées dans la culture populaire qui témoignent de notre croyance en l’existence d’une connexion intime entre l’homme, la nature et le sacré. L'ésotérisme, quant à lui, est la recherche de la connaissance cachée, souvent associée à des pratiques occultes et mystiques. Avec lui, la magie devient un outil de transformation personnelle, traçant un chemin lumineux vers la sagesse. Les alchimistes, les kabbalistes et les hermétistes ont exploré ces domaines, pour percer les secrets de l'univers, de la matière, du temps et de la vie.

Magie blanche et magie noire

Dans de nombreuses cultures et traditions, on prend en compte l'intention du praticien pour qualifier le type de magie pratiquée par celui-ci. Selon que ses intentions sont positives ou négatives, on parle de magie blanche (ou encore de magie du bien) ou de magie noire (ou encore magie du mal). La magie blanche est donc utilisée dans l'intention d'apporter le bien-être, la guérison et la protection. Elle se fonde sur la croyance que les énergies positives peuvent être invoquées pour influencer le monde d'une manière bénéfique. Ses adeptes – appelés guérisseurs, sages-femmes ou sorciers blancs – se concentrent sur l'harmonie entre l’homme et l'univers pour aligner leurs actions avec un ordre moral et spirituel élevé. Les prières, bénédictions et incantations rituéliques font usage d'objets divers tels que des cristaux, des herbes sauvages et des talismans conçus pour canaliser ou amplifier l'énergie positive émanant de l’univers. Cette forme de magie, parfois associée à des traditions païennes ou chamaniques, s’appuie sur des croyances ancestrales et sur une profonde connaissance des cycles de la nature.

Pratique de la magie noire, représentation de l'apocalypse • Photo 28649919 © Wisconsinart | Dreamstime.com

À l'opposé, la magie noire est traditionnellement associée à l'ambition personnelle, au désir d’exercer un pouvoir sur autrui ou à la volonté de nuire. Elle inclut les malédictions, les envoûtements et la nécromancie. Dans l'imaginaire collectif, les adeptes de la magie noire cherchent à obtenir des résultats immédiats sans considérer les conséquences morales ou les répercussions potentiellement négatives que cette magie peut avoir sur eux-mêmes ou sur les autres. Les stéréotypes existant autour de la magie noire sont intimement liés à l'invocation de forces démoniaques, à la pratique de sacrifices et aux rituels secrets. Souvent réprouvée par les cultes établis, cette magie est fortement influencée par les contextes culturels et religieux ; ce qui est considéré comme noir ou néfaste pouvant varier d'une culture à l'autre.

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Mais l’apparente dichotomie entre magie blanche et magie noire n'est pas aussi claire qu'il y paraît. La magie devrait plutôt être perçue comme un outil neutre dont la couleur morale dépend de l'intention du magicien. Dans cette vision moins manichéenne, un sort peut être lancé dans un but bénéfique ou malveillant selon le cœur du praticien. Certaines cultures prônent d’ailleurs la pratique d’une magie grise, qui navigue entre ces deux extrêmes, considérant que les motivations humaines sont complexes et nuancées. Expression de notre volonté et de nos connaissances, la magie est capable de bienfaits et de maux selon la sagesse et la connaissance de ceux qui l'exercent.

Les grands magiciens de l'histoire

Dans l’Antiquité, la magie était indissociable des pratiques religieuses et spirituelles. Les prêtres égyptiens, réputés pour leurs miracles et autres prophéties, s’appuyaient sur une parfaite maîtrise de l’illusion pour convaincre les fidèles de leur connexion avec les dieux. Dans l’Égypte antique, on raconte que des prêtres utilisaient des automates actionnés par des systèmes ingénieux de poulies pour faire bouger des statues ou ouvrir les portes d’un temple, en donnant l'illusion d’actions magiques ou d’interventions divines. Les oracles de la Grèce antique prétendaient être capables de prédire l'avenir en se mettant dans des états de transe induits par des substances secrètes. Au Moyen Âge, en dépit de la condamnation de la magie par le christianisme, quelques prestidigitateurs audacieux se donnèrent en spectacle. C’est sans doute à cette époque que se développa le jeu de la balle et des 3 coupes dans lequel les spectateurs sont invités à suivre une balle cachée sous l'une des coupes manipulées par le praticien. De nos jours, des manipulateurs peu scrupuleux organisent des parties à la sauvette dans les rues des villes. Entraînés et habiles, ils tentent de plumer touristes et badauds en les invitant à parier sur la position de la balle. Une version alternative du jeu consiste à remplacer la balle et les coupes par 2 cartes noires et une carte rouge, le parieur devant deviner la position de cette dernière.

Jeu de bonneteau • Photo 1411487 © Dana Rothstein | Dreamstime.com

À la Renaissance, l'intérêt pour la science et l'art conduisit les prestidigitateurs à se distinguer des pratiques occultes. Certains magiciens, à l’instar de Girolamo Scotto, acquirent une grande renommée en se produisant à Venise, devant une noblesse ébahie. Sotto était réputé pour ses tours de cartes et ses illusions d'optique qui confondaient même les esprits les plus avertis.

Un automate magique qui joue aux échecs

En 1770, Wolfgang von Kempelen, inventeur et magicien génial, construisit un automate baptisé le Turc mécanique. Ce dispositif magique prétendait jouer aux échecs contre un humain. Kempelen le présenta à la Maison des Habsbourg à Vienne où l'automate impressionna les spectateurs par sa capacité à jouer de manière compétente. Le Turc, habillé à la mode ottomane, était assis derrière un grand coffre en bois d'où s’échappaient de curieux bruits mécaniques. L'illusion était parfaite : l’automate pouvait non seulement déplacer les pièces sur l’échiquier mais aussi répondre aux mouvements de son adversaire, qu’il battait la plupart du temps. L’automate voyagea à travers l'Europe et l'Amérique, suscitant étonnamment, curiosité et admiration des spectateurs. L’illusion résultait d’une ingénieuse tromperie : le coffre cachait un espace où un maître d'échecs se tenait assis et contrôlait les mouvements de l'automate. Un système complexe de leviers et d'aimants permettait à ce comparse de voir les mouvements des pièces adverses sur l'échiquier et de manœuvrer la main du Turc en conséquence.

Le Turc : automate joueur d'échecs • © BNF

Le secret de l'automate donna lieu à de nombreuses spéculations et enquêtes avant d’être enfin révélé au public. Détruit dans un incendie en 1854, Le Turc constitue un exemple fascinant d’une combinaison parfaite entre magie, mécanique et mystification, témoignant de l'ingéniosité humaine dans l'art de l'illusion.

Jean-Eugène Robert-Houdin (1805-1871), le père de la magie moderne

Ce clerc de notaire, passionné de mécanique et d’horlogerie, est considéré comme le père de la magie moderne. Son génie, son habileté manuelle et ses incontestables talents d’inventeur lui ont permis de transformer une discipline de rue, souvent pratiquée par des charlatans désargentés, en un art de divertissement respectable. En 1845, il créa à Paris le Théâtre des soirées fantastiques situé au Palais-Royal et contenant 225 places. Il y donnera des spectacles de magie, présentant au public de nombreux automates mécaniques ainsi que des illusions d’un genre nouveau. L’équipement de la scène et celui de la salle sont conçus comme des pièces d’horlogerie savante, permettant au prestidigitateur d’enchanter le public à l’aide d’une machinerie remarquable d’ingéniosité, faisant même appel à l’électricité et exploitant les charmes magiques de l’électromagnétisme. Le succès est immédiat et Robert-Houdin fait fortune en quelques années. « Un magicien ne révèle jamais ses secrets » aurait-il déclaré. Certains de ses procédés sont pourtant révélés dans ses mémoires qu’il publie vers 1 855. Robert-Houdin s’éteint en 1 871 après s’être retiré de la scène depuis plus de dix ans. Son théâtre change plusieurs fois de propriétaire, jusqu’à ce que Georges Méliès, un illusionniste âgé de 27 ans, en fasse l’acquisition en 1 888. Méliès y donne des spectacles féeriques. À partir de 1896, il organise des séances de projection de ses premiers films, à l’instar d’Escamotage d'une dame au théâtre Robert-Houdin, fortement inspiré par le génie mécanique et les illusions de Robert-Houdin.

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Harry Houdini (1874-1926), le roi de l’évasion

Éric Houaiche est né à Budapest en Hongrie le 24 mars 1874. Considéré par de nombreux adeptes comme l’un des magiciens les plus doués de l'Histoire, notamment grâce à ses évasions spectaculaires, cet illusionniste génial choisit son nom de scène en hommage à son mentor, Robert-Houdin. Il est âgé de 4 ans lorsque ses parents émigrent aux États-Unis. Il développe très tôt une fascination pour la prestidigitation et fait preuve d’une grande habileté manuelle, doublée d’une remarquable ingéniosité. En 1898, il lance un défi à la police de Chicago, se prétendant capable de se libérer d’une prison en moins de 30 minutes. Il ne lui en faut pas plus de 3 pour s’extirper de sa cellule, sous les yeux ébahis de ses geôliers. Malin et téméraire, il avait avalé au préalable une sorte de passe-partout, mettant à profit une technique de concentration et de respiration apprise quelque temps auparavant d’un avaleur de sabre. Cet épisode contribue à forger sa réputation de maître de l’évasion. Fervent défenseur de l’art de la prestidigitation, Il part en croisade contre les médiums qui prétendent posséder des pouvoirs surnaturels et sont à l’époque très populaires. Conduisant des enquêtes minutieuses à propos des pratiques de tels charlatans, il se lie d'amitié avec Sir Arthur Conan Doyle, le créateur de Sherlock Holmes. Soucieux de ne pas dévoiler ses propres trucs, il n’a de cesse d’affirmer qu’il ne possède lui-même aucun pouvoir surnaturel, allant jusqu’à proposer à tout magicien de le défier. Houdini affirme ainsi être en mesure de comprendre n’importe quel tour de prestidigitation en le voyant faire moins d’une dizaine de fois. Le célèbre magicien canadien Dai Vernon (1894-1992), surnommé le professeur, relève le défi et lui présente un tour 8 fois de suite. La fatuité d’Houdini est prise en défaut, le secret du tour échappant à sa sagacité. Vernon a poussé la technique des tours de carte à un niveau jamais atteint auparavant.

David Copperfield (né en 1956) : le magicien de tous les superlatifs

David Seth Kotkin est l'un des magiciens les plus célèbres de la fin du XXe siècle, connu pour ses illusions à grande échelle. Il remporte 21 Emmy Awards, récompense ultime décernée par la télévision américaine. Il détient 11 records enregistrés au Guinness et est même fait chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres par le gouvernement français. Véritable prodige de l’illusion, il est admis à 12 ans seulement à la prestigieuse société des magiciens américains (SAM). Perfectionniste et metteur en scène talentueux, il produit une œuvre mêlant son, lumière, danses sensuelles et magie pour créer des spectacles somptueux, oniriques et grandiloquents. Il fit notamment disparaître la Statue de la Liberté et traversa la Grande Muraille de Chine.

La magie à l'ère du numérique

L'avènement de l’Internet et le boom des réseaux sociaux offrent aux magiciens contemporains de nouvelles opportunités pour promouvoir leurs talents et conquérir leur public. Dynamo (né Steve Freine le 17 décembre 1982), est un magicien anglais qui pratique la magie de rue et s’est rendu célèbre en créant la série télévisée baptisée Magicien de l’impossible. Il réalise des tours de magie un peu partout dans le monde et filme la stupéfaction de son public, n’hésitant pas à utiliser des techniques modernes et des effets spéciaux innovants.

Forêt de Broceliande, l'épée dans l'enclume • Photo 295384130 | Broceliande © J Paquet | Dreamstime.com

Merlin l’enchanteur, emblème séculaire du magicien savant

Savant, prophète, magicien, druide, enchanteur, bâtisseur, érudit, visionnaire, sorcier, mentor… voilà un florilège des termes utilisés par les nombreux auteurs qui, à différentes époques, se sont intéressés au personnage légendaire de Merlin. Né de la tradition orale galloise, Merlin apparaît dès le Moyen Âge dans la littérature. Il est explicitement associé à la légende du roi Arthur par l’évêque gallois Geoffroy de Monmouth au XIe siècle ainsi que par le chevalier français Robert de Boron au siècle suivant. Merlin devient dès lors une figure emblématique du savoir, de la sagesse et de la spiritualité. Intimement lié à l’alchimie, il porte un nom qui rappelle d’ailleurs Mercure. Sa connaissance de la science lui permet d’incarner le rôle du sage absolu selon le psychanalyste Heinrich Zimmer. Dans la légende arthurienne, Merlin tient le rôle de conseiller et d’instructeur entouré de Blaise, le scribe qui conte son histoire, et des Chevaliers de la Table ronde. Utilisant ses connaissances et ses pouvoirs immenses, il contribue au couronnement d’Arthur.

Le roi Arthur est une figure légendaire et mythique qui, selon les récits médiévaux, aurait régné sur la Bretagne, une région historique située dans l'actuel Royaume-Uni. Son histoire s’articule autour des récits des Chevaliers de la Table Ronde et de la quête du Saint Graal. Le royaume d'Arthur est souvent associé à Camelot, sa cour légendaire, bien que les détails précis de son emplacement et de son existence soient sujets à de nombreuses interprétations et spéculations. L'existence historique du roi Arthur n’est pas clairement établie et reste dans le domaine du mythe et de la légende.

Personnage d'Albus Dumbledore à l'écran dans la saga Harry Potter • Photo 274891767 | Albus Dumbledore © Ddcoral | Dreamstime.com

Le rôle de Merlin évolue au fil du temps et des récits. Initialement savant, devin, homme des bois un peu loufoque, doté d’une connaissance extrême de la nature et des astres, il incarne le mentor qui guide les héros vers leur destin. Il devient ainsi conseiller d’Arthur, puis amant malheureux de la fée Viviane. René Barjavel traite notamment de cette relation amoureuse dans le conte L'Enchanteur. Selon lui, Merlin dut choisir entre la préservation de ses pouvoirs magiques, qui reposaient sur sa virginité, et son amour pour Viviane. Cette dernière, qui vécut dans la forêt de Brocéliande, se rendit célèbre par l’enlèvement du jeune Lancelot, qu’elle conduisit au plus profond d’un lac pour lui enseigner les arts et les lettres jusqu’à ce qu’il eût 18 ans. Elle le présenta alors aux Chevaliers de la Table ronde et il devint l’un d’eux.

Illustré notamment par Gustave Doré puis par Howard Pyle, Merlin suscite l’intérêt d’un grand nombre d’auteurs tels que l’écrivain romantique Robert Southey, le poète Matthew Arnold, l’immense Goethe, le poète et historien Edgar Quinet, jusqu’à Mark Twain, l’auteur de Tom Sawyer. Au milieu du XXe siècle, le personnage de Merlin part à la conquête du cinéma, notamment dans le magnifique Merlin l’Enchanteur de Walt Disney sorti en 1963, l’adaptation de l’œuvre Le Seigneur des anneaux de Tolkien en 1998 et la saga Harry Potter de J.K. Rowling où il s’incarne dans le personnage d’Albus Dumbledore.

Harry Potter : l'apprenti magicien

La saga Harry Potter se déroule dans un univers magique caché, parallèle à notre monde, centré autour de l'école de sorcellerie de Poudlard. Cette sage composée de 7 romans fut imaginée et écrite par l'autrice britannique J.K. Rowling entre 1997 et 2007. Rowling prétend avoir eu l'idée des aventures du jeune sorcier lors d'un trajet en train après lequel elle se mit à fréquenter de manière assidue de nombreux cafés situés à Édimbourg afin d'y écrire les différents tomes qui composent la saga.

Les 7 tomes de la saga Harry Potter • Photo 105860832 © Siempreverde22 | Dreamstime.com

Harry Potter met en scène plusieurs personnages, magiciens ou non, autour du héros éponyme, un orphelin élevé par de simples mortels désignés par le terme moldus. Harry découvre qu'il appartient au monde des sorciers le jour de son onzième anniversaire. Dès lors, contre l'avis de ses tuteurs complètement récalcitrants à l'emploi de la magie, il fréquente l'école de sorcellerie de Poudlard dirigée par Albus Dumbledor, un magicien vertueux, courageux et fort sage. Harry se lie d'amitié avec la jeune Hermione Granger, une sorcière née de parents moldus et dotée d'une remarquable intelligence. Ron Weasley, issu d'une grande famille de sorciers, complète le trio et prend part à ses aventures.

Les sortilèges utilisés dans la saga ont des applications variées : duel, soins, règles devie quotidienne... Ils vont de simples enchantements comme "Lumos" pour créer de la lumière, aux formules complexes comme "Expecto Patronum" qui vise à repousser certains ennemis. Les sortilèges nécessitent une prononciation correcte et une baguette adéquate. Leur efficacité témoigne de la maîtrise du sorcier qui les emploie et leur apprentissage peut être fastidieux.

De nombreux éléments de la saga ont une signification profonde ou des liens avec la mythologie et l'histoire. La magie et ses mystères permettent à l'autrice d'aborder des thèmes difficiles, liés à l'adolescence : l'amitié, le courage ou encore la lutte contre le mal et le développement du libre arbitre. Les personnages sont complexes et le récit de leurs péripéties constitue une trame plaisante pour traiter des relations humaines autour des thèmes de la loyauté, du sacrifice et de la trahison. Avec plus de 500 millions d'exemplaires vendus, la saga Harry Potter rencontre un succès mondial. Les aventures du jeune apprenti sorcier sont adaptées au cinéma et des parcs à thème s'en inspirent directement.

Mandrake le magicien

Mandrake est un héros de bande dessinée américaine (comics strip) créé en 1934 par Lee Falk, illustré par Phil Davis, qui donna au personnage les traits de son créateur. Mandrake est un élégant magicien, aux cheveux gominés, vêtu d’un smoking, d’un chapeau haut-de-forme et d’une cape noire et rouge. Lorsque Davis est mobilisé en 1942 au cours de la seconde guerre mondiale, il demande à son épouse de le remplacer. Martha est dessinatrice de mode et s'acquitte parfaitement de cette tâche. Durant quelques semaines, avant le décès de son mari en 1964, Martha reprend le crayon et réalise seule les dessins de la série.

Doté de super pouvoirs et d'un talent d'hypnotiseur, Mandrake est un justicier qui ressemble à un personnage de music-hall tout droit sorti d’un théâtre. Accompagné de Lothar, son ami et fidèle serviteur, mais aussi de Narda sa fiancée, une princesse européenne, il combat les bandits et les criminels en tous genres, notamment Cobra, le pire ennemi de la bande.

Mandrake le magicien

La BD voit paraît dans plusieurs quotidiens américains à partir de 1934. Son succès quasi immédiat convainc l'éditeur d'opter pour une parution hebdomadaire dès le mois de février 1935. En France, les aventures de Mandrake le magicien sont publiées par l’éditeur Paul Winkler. Après la guerre, les Éditions des Remparts prennent le relai, aux côtés du journal de Mickey (également créé par Paul Winkler). Pendant de nombreuses années, le quotidien France-Soir propose à ses lecteurs des planches du dandy magicien. Un recueil complet de ces dernières a été édité en 4 tomes entre 1934 et 1942 par Futuropolis.

À l’instar de Flash Gordon (un autre héros de comics strip), Mandrake est l’un des personnages de BD les plus célèbres du XXe siècle. Malgré son style plutôt classique, Mandrake introduit le fantastique dans la bande dessinée policière. Ses aventures ont été adaptées au cinéma sous forme de courts feuilletons, alors très en vogue aux États-Unis. Le style et les pouvoirs extraordinaires du magicien intrépide inspireront de nombreux créateurs de super-héros de BD.

Federico Fellini eut le projet de porter les aventures du magicien à l’écran, avec Marcello Mastroianni dans le rôle titre. Si le projet ne vit pas le jour, Mastroianni portera le costume du magicien dans le film Intervista du même auteur. Dans le film Docteur Folamour de Stanley Kubrick, le personnage incarné par Peter Sellers s’appelle Lionel Mandrake. Le magicien inspira même Claude François qui écrivit une chanson inspirée de ses aventures, Le magicien, sortie en 1968. George Bangable, le maître de cérémonie et gentleman crooneur du cabaret le Crazy Horse, s’est inspiré de l’acteur Clark Gable et du magicien Mandrake pour créer son personnage. En France, la statuette d’or qui récompense les magiciens a été sculptée à l'effigie de Mandrake.